Les Matériaux Parisiens

Les Matériaux Parisiens

Et si la ville recyclait elle-même une partie de ses déchets organiques pour produire de nouveaux biomatériaux durables ?

6 avril 2023

En partenariat avec ManEcho, société de conseil spécialisée en stratégie de distribution, LSA vous présente régulièrement des startups prometteuses. Ici, Les Matériaux Parisiens, qui à partir de déchets organiques – marc de café, écorces d’agrumes… – récuperés auprés des commerces urbains comme les supermarchés, boulangeries, restaurants ou cafés, créent des biomatériaux et des objets durables. La startup ambitionne de construire un réseau d’ateliers locaux au sein des villes, chargés de récupérer et de transformer ces ressources pour les valoriser.

Qui ?

Ulysse Hellouin, ingénieur en biotechnologies, et Thibaut Nillès, spécialisé dans le marketing et le business, veulent prendre une part active dans l’évolution de notre société, afin de la rendre plus respectueuse de l’environnement. À leurs yeux, l’un des sujets préoccupants porte sur les déchets organiques car leur recyclage reste largement insuffisant. Or, ces matières peuvent se révéler être des ressources d’exception, dont les propriétés serviront à créer d’autres produits. Une écorce d’orange, par exemple, jetée habituellement à la poubelle, devient pourtant, transformée, un matériau flexible, résistant, pouvant être réutilisé en contenant alimentaire, cuir végan ou en bio textile, notamment. Afin de donner vie à leur projet, les cofondateurs ont créé, en 2022, Les Matériaux Parisiens, dont la mission est de donner à ces ressources une valeur nouvelle au sein même de la ville.

Quoi ?

Marc de café, chapelure de pain rassis, poudre de bois, peau et noyau d’avocats, drêche de brasserie, écorces d’agrumes sont autant de déchets dont les propriétés sont identifiées et réutilisées par Les Matériaux Parisiens pour créer des biomatériaux. Grâce à un procédé de transformation en plusieurs étapes : séchage, stockage, broyage, compactage… La thermo compression, qui met la matière sous pression et la chauffe, permet de faire les liaisons nécessaires entre les différentes molécules de sucre, d’amidon, de fibres, notamment. Des phases d’usinage et de ponçage peuvent aussi être nécessaires avant l’obtention de la matière ou de la forme finale de l’objet. Le tout sans colle, ni liant exogène, seulement en utilisant les propriétés intrinsèques des déchets. Le but de la startup est de développer un catalogue d’applications différentes, pour chaque type de déchet organique. Les produits créés sont, pour l’heure, des petits mobiliers, objets de décoration, mais aussi de la PLV, des supports signalétiques. Les Matériaux Parisiens ont déjà fabriqué, pour un torréfacteur, un principe de boîte de conservation à base de marc de café. Huiles et cires usagées, poudre de lait, algues, cheveux (pour la kératine) sont à l’étude, car les propriétés de ces ressources sont riches. La startup vise à remplacer les matières traditionnelles comme le bois, pour ne pas épuiser la planète, ou le plastique, facteur de pollution.

Et demain ?

La startup fabrique actuellement ses produits au sein d’un atelier parisien dont la presse peut produire 25 tonnes de biomatériaux par an. Et valoriser ainsi entre 50 et 60 tonnes de déchets organiques (car une partie part en eau). Le but des cofondateurs est d’industrialiser le process via la construction d’un réseau d’ateliers, qui pourraient être localisés au sein même des entreprises, des collectivités locales, des cantines, espaces de coworking, centres commerciaux… Être proche de la ressource permet de gagner en temps et en efficacité, car l’atelier peut être adapté à la typologie de déchet du lieu. L’idée est que la ville puisse recycler elle-même une partie de ses déchets pour réduire sa consommation de matières vierges comme le bois, par exemple. La ville deviendrait ainsi un lieu de production de ses propres matériaux qui seraient utilisés pour diverses applications. La startup séduit déjà des collectivités, et vise désormais à nouer d’autres partenariats avec des industriels, distributeurs, entreprises, ESAT afin de gagner en puissance dans une démarche co-constructive.

©Mathilde Ducasse et Thibaut Nilles