Perspectives et enjeux 2023
Perspectives et enjeux 2023 – Se démarquer encore plus
12 janvier 2023
L’exercice budgétaire 2023 a été compliqué pour beaucoup d’entreprises. D’ailleurs, les chiffres du premier trimestre seront déjà difficiles à tenir pour certains. À cause du nouveau pic d’inflation attendu, et d’une rentrée sociale animée, du fait de la réforme des retraites, notamment. Enfin, la croissance française risque de basculer dans le rouge. L’histoire a montré, à maintes reprises, qu’une forte inflation se traduit par une récession.
Pour les retailers, trouver la bonne équation économique s’avère complexe, car la consommation baisse, tandis qu’ils ont un besoin vital d’investir fortement dans la transformation numérique (digitale et data) et environnementale, dont la rentabilité ne sera pas immédiate. Changer coûte cher. Les frais ont déjà été passés au tamis. Le modèle se grippe, puisque son financement est historiquement basé sur les volumes des ventes de produits des marques nationales qui alimentent la pompe des remises différées.
Il faut donc faire plus, plus vite, mais avec moins. Comment ? En se concentrant sur ce que veulent les consommateurs, et sur ce qu’ils n’ont pas encore ou insuffisamment. Bref, en se démarquant.
Améliorer la relation client
La façon dont la technologie influe sur le retail ne cesse de s’accélérer. Aujourd’hui, un grand nombre d’outils qualitatifs peuvent assister les équipes des sièges (assortiment, pricing, promotion) et celles des magasins (rupture, merchandising, balisage prix, démarque) dans l’excellence opérationnelle. Le pilotage s’en trouve ainsi facilité, mais souvent au détriment de la relation avec le client. Lors de mes multiples visites en magasins, je suis souvent surpris par les questions que posent les dirigeants à leurs collaborateurs : elles portent davantage sur la gestion du rayon (niveau de démarque, taux de rupture) que sur les actions engagées pour développer les ventes des produits, dont ils ont la charge. Faut-il des gestionnaires ou des commerçants pour accueillir, écouter et informer les clients ? Il devient impératif de pousser le curseur vers davantage de commerce, que ce soit via le recrutement, le management des équipes et les formations. Avec à la clé plus d’épanouissement, de motivation et de sens pour des salariés au service de l’amélioration du NPS.
Offrir des produits plus locaux
La fracture va continuer de se creuser entre une partie de la population, qui s’oriente vers une consommation responsable, et une autre en prise avec des problèmes financiers. Les enseignes généralistes alimentaires essaient de s’adapter au contexte en diminuant le nombre de références détenues en magasins, ainsi qu’en réduisant les gammes bio, au risque de proposer une offre sans véritables aspérités. Les ventes de MDD s’envolent, notamment celles qui sont positionnées sur le segment du prix. Lorsqu’on se penche sur les étiquettes, force est de constater que, de plus en plus, les recettes sont réalisées avec des composants importés de l’étranger. Or, les consommateurs attendent de trouver des MDD faisant appel à des ingrédients français. Un beau challenge pour les équipes produits et qualité des enseignes ! Carrefour vient, d’ailleurs, d’annoncer le lancement d’une gamme MDD origine France.
Pour autant, ces évolutions tactiques ne peuvent cacher la carence actuelle d’une vision commune, partagée par tous, du devenir de notre agriculture et de notre souveraineté alimentaire.
Intensifier le Category Management
Industriels et distributeurs peuvent travailler ensemble à créer de la valeur, en suscitant de l’émotion dans l’acte d’achat. Quand la volonté est là, le résultat est souvent spectaculaire. Deux exemples ont été multi récompensés fin 2022 par les professionnels du secteur : le « beauty box », concept beauté Lidl/L’Oréal et « le club », concept alcool de Pernod Ricard chez Intermarché.
S’allier avec des acteurs aux aptitudes complémentaires
Pour venir conforter le modèle, enrichir l’expérience, réduire les CAPEX, les alliances se développent : shop in shop, retail média (Carrefour et Publicis), live shopping (Carrefour et Brut), gestion des ruptures magasin (Casino et Believe), casiers Vinted en magasins, gestion des invendus (Comerso), mode de seconde main (Auchan et Rediv), la robotisation des entrepôts (Exotec). La liste est longue, mais il faut continuer d’expérimenter. Le métavers finira par trouver sa voie, les réseaux sociaux ne cachent plus leur appétit pour l’e-commerce. L’offre servicielle est certainement celle qui possède l’un des plus forts potentiels de développement (location, réparation, livraison…). Il faudra donc nouer de nouvelles alliances, notamment avec des startups, aujourd’hui de plus en plus matures dans leur approche.
Optimiser les mètres carrés
La rationalisation des parcs magasins va s’accélérer sous la pression de l’exode urbain, initié avec la crise sanitaire, la montée en puissance des discounters alimentaires et non alimentaires, la croissance de l’e-commerce, les nouveaux acteurs (Grand Marché Frais d’Ici de la coopérative Terract). La rapidité de ces mutations demande d’agir sans tarder. Trop de mètres carrés sont disponibles. Evidemment, il faut regarder au cas par cas. Mais pour certains sites, il sera nécessaire de réduire les surfaces ou de les affecter aux nouvelles attentes des consommateurs en généralisant par exemple la vente des produits d’occasion ou la location.
Au cours de cette nouvelle année qui s’annonce difficile, les gagnants seront ceux qui mettront de la proximité avec leurs clients. Ce n’est pas révolutionnaire, mais encore faut-il le faire !
Bonne année à tous et bonnes ventes
Patrice Quinqueneau est associé chez ManEcho. Après une expérience de trente ans dans la distribution (Biens d’équipement et Carrefour), il crée en 2013 avec Mathilde Ducasse le cabinet de conseil ManEcho.
ManEcho intervient en France et à l’international auprès des dirigeants des marchés de consommation et de distribution dans la définition et la mise en œuvre de leurs stratégies.